Tout est dit du délire corse à la lecture de l’arrêt rendu ce jour par la Cour de cassation : une demande de permis de construire 5 villas pour 900 m2 dans un secteur emblématique à Bonifacio, au milieu de nulle part ; un maire qui oublie d’instruire et permet l’octroi d’un PC tacite ; un constructeur écolo qui prend conscience qu’il doit faire moins grand et déplace son projet en le réduisant … mais sans demander de nouveau PC, 2 km de piste créés et des travaux au vu et au su du maire qui ne dressera pas procès-verbal, un procès-verbal de la DDTM qui viendra bien tard, un préfet qui demande la démolition en première instance mais plus rien ensuite, un Procureur qui demandera aussi la démolition mais ne fera pas appel du refus de démolir, un montant d’amende élevé et la partie civile, U Levante seule en appel accrochée à sa demande de démolition telle la patelle corse à son rocher.

Mais l’intérêt de l’arrêt dépasse largement l’affaire : la Cour de cassation casse le raisonnement suivi par la Cour d’appel de Bastia pour rejeter la demande de démolition d’U Levante.

Il faut rappeler que la demande de démolition de la partie civile constitue une demande de réparation de son préjudice moral, constituée par l’atteinte à ses intérêts collectifs : la construction porte atteinte à l’environnement protégé par l’association, celle-ci demande la cessation de l’atteinte à l’environnement.

Or, curieusement, la Cour d’appel et le Tribunal s’étaient fondés sur l’inertie de l’administration, les palinodies du parquet, le montant de l’amende et, cerise sur le brocciu, le fait que le prévenu aurait pu construire beaucoup plus en toute légalité pour refuser d’ordonner la démolition.

Quel rapport avec le préjudice subi par l’association ? On se le demande encore.

Ce raisonnement est donc censuré par la Cour de cassation qui opère par la même occasion un contrôle des motifs des refus de la réparation.

Surtout, cette décision est l’occasion de rappeler le principe de la réparation intégrale du préjudice de l’association qui suppose en principe qu’il soit fait droit à sa demande de démolition. Ce principe est à concilier avec le respect de l’article 8 de la CESDH qui protège le droit au respect de sa vie familiale si la démolition porte gravement atteinte au domicile de vie de la personne, le tout conformément au principe de proportionnalité. Notre thèse sans cesse défendue selon laquelle la démolition doit être ordonnée à titre de réparation civile quand la construction porte atteinte à l’environnement et qu’il ne s’agit pas du domicile principal de la personne s’en trouve renforcée.

Espérons maintenant que les juges du fond l’appliqueront !

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